L'exemplarité comme la confiance, ne se décrètent pas. L'art de la transmission du Maître Maçon, est tout sauf l'imposition d'un savoir. Il s'agit de donner à l'Apprenti "matière" à penser, par lui-même, révéler sa part de Lumière qu'il est venu chercher en frappant à la porte du Temple.
L'un de ces Maîtres m'a rapporté un jour la très belle parabole d'un chef indien d'Amérique du nord qui sculptait tous les jours des totems. Il dit: je ne sculpte pas l'animal dans ce tronc d'arbre. L'animal est déjà là, je ne fais qu'enlever les aspérités du bois pour le révéler.
Je crois qu' il en est de même pour Soi et pour la Lumière que nous cherchons: elle est déjà là! Nous sommes déjà pleinement là, mais nous devons nous révéler par notre apprentissage et une méthode, grâce à l'accompagnement des Maîtres qui nous ont précédé sur le chemin, et qui nous apprennent à dégrossir notre Pierre.
Il y a deux modes de transmission:
- Celui de la rigueur et une certaine forme de discipline (Latin: disciplinare = apprendre), je dirais non négociables : les valeurs morales et les mœurs sociales, notre comportement à l'égard de notre prochain, les règles pratiques de notre Humanité et qui sont incontournables, toutes morales confondues ; par l'observance de nos rituels initiatiques Sacrés qui doivent être assidûment suivis, jusque dans une gestuelle qui paraît parfois grotesque, et la disposition spécifique et figée des outils en loge. Faute d'être comprise de prime abord, cette discipline ouvrira progressivement l'Apprenti à de nouveaux horizons de Conscience, sans violence et sans dogmatisme.
- Celui de la transmission "d'accompagnement" vers Soi, vers la Lumière, par et pour laquelle le Maître devient le guide de l'Apprenti, par la valeur de l'exemple et du désir que le Maître suscite - en lui, et par lui-même, de se dépasser et de transcender ses savoirs profanes, de susciter le mouvement de ses idées et de ses vieux acquis.
D'ailleurs le mot méthode a bien l’étymologie de "chemin", comme l'apprentissage celle de mesure et de mouvement vers ... Soi.
La vérité n'est donc pas pour nous Maçons, comme dans le monde profane, une matière inerte et figée qu'on impose, comme le font les savants ou les professeurs d'école ou d'université. Un savoir arrogant qui se monnaye ou s'impose par la force. Ça, c'est un savoir contre productif qui ne sert les intérêts que de l'orgueil oligarchique et qui est, dans tous les cas, un savoir clé en main. La connaissance est un "sa-voir' clé en Coeur!
La transmission est toujours relative à une vérité mobile, qui évolue avec nos degrés de perception et de conscience. La connaissance ne se consomme pas. Elle n'est pas une recette magique extérieure qu'il suffirait d'ingérer comme un médicament qui agirait seul...
Il ne suffit pas de donner ou de recevoir. Le processus est subjectif, totalement personnel et humble, tant pour le Maître que pour son Apprenti.
Les rites, les symboles et les outils maçonniques, sont donc comme un grand livre ouvert dont la lecture évolue avec nous tout au long de notre vie.
Le droit à l'erreur et au doute, font partie de notre apprentissage. Nous ne sommes pas des êtres parfaits et c'est d'ailleurs pourquoi, dans le Temple et à l'extérieur de ses murs, les Maîtres eux-mêmes restent des Apprentis toute leur vie avec la ferme volonté de participer aux progrès de l'Humanité par leur propre cheminement.
La Transmission est belle, car elle permet de passer au delà de nous-même, vers cet horizon jadis inaccessible, faute d'outils, de persévérance et de guide.
L’exemplarité n’est pas une façon d’influencer. C’est la seule
Il faudrait essayer d'être heureux, ne serait-ce que pour donner l'exemple.