I- Devenir ?
Devenir, serait-ce continuer de croire mentalement en une "évolution" de Soi-même qui aurait besoin du temps pour se construire? Devenir, serait-ce s’appuyer sur la chronologie et l’expérience, qui incluent la souffrance et les choix de façon systématique, comme un automate qui sonne le métal dans l’écho de son propre vide?
Cette aventure ne nous sclérose t’elle pas depuis bien trop long-temps dans cette dimension aveuglante où la dualité règne en Maître, et où les ressentis fluctuent en fonction de nos conditionnements, de nos inégalités géographiques, mentales ou physiques, comme si c’était un fait accompli et incontournable qu’en cette vie, seuls les plus brillants réussiraient, deviendraient des « hommes » c’est-à-dire, se porteraient assez loin pour comprendre, les autres n’ayant d’autre choix, malgré eux, de rester derrière eux, sans compassion?
Voici donc le schéma archaïque qu’on nous propose depuis notre prime enfance, comme on enseigne la compétition aux athlètes qui n’ont d’autre liberté que de consacrer chaque seconde de leur vie à la performance et à la douleur qu’elle implique. Être le meilleurs d’entre tous ? Est-ce cela le Bonheur ?
Le Bonheur n’est t-il que la satisfaction d’une réussite, un horizon? Mais alors qu’est ce que la réussite? Un horizon lointain ou un mouvement spontané qui ne s'attendrait plus?
L’objet d’une convoitise ne peut être un but commun sans mise en concurrence, sans lutte de pouvoirs, sans combat de l’homme contre l’homme. Le Bonheur projeté peut-il nous mener, dans ces conditions, à la fraternité que l’Utopie des lumières mentales nous promet? Et s’il en est, avons nous tous les mêmes chances d’y parvenir ? La réponse en ce monde matériel est naturellement : non ! Il n’y a qu’à observer l’Histoire du monde, pour constater à quel point les objectifs sont toujours basés sur des rapports de forces. Je ne mets pas d’accent majuscule ici, au mot force et pour cause, car cette progression est le fruit d’une faiblesse, d’un égarement, d’une fuite ! On croit devoir marcher loin, on évolue, on marche loin, mais on s’éloigne surtout : de Soi-même.
Oui, Devenir c’est s’éloigner de Soi-même ! Cette quête de satisfactions matérielles, consistant à s’adapter aux buts toujours singuliers qu’on se fixe, jamais vraiment les nôtres et c'est un paradoxe, puisque dictés par nos faux pairs et par l’emprise d’une société qui nous invite aux voyages, à cette façon de sortir du lot et de cultiver ce goût du "Moi" dans le rejet des autres, qui consiste à semer les autres, à les distancer, comme le coureur élimine ses concurrents sur la piste aux « fausses » étoiles. En semant les autres on ne sème aucune graine, mais on devient poussières vides. On est morcelés à la frontière de Soi, et séparés les uns des autres, dans une course effrénée vers l’accessoire.
Car ce firmament, cette réussite, ce devenir n’est qu’une illusion de victoire. On tient en main une coupe en Or c’est vrai, mais qui n’est qu’un veau d’or, un calice en métal, symbole d’orgueil et de vanité sans aucun rapport avec le Graal si symbolique de notre accomplissement sacré.
Devenir c’est croire qu’on ne naît rien et qu’on ne grandit que grâce à ce qu’on accumule. Cette quête de connaissance et de biens matériels, qui génère toujours de l’insécurité, est un but sans fin. Car enfin ! s’il suffisait de "savoirs" pour sentir la plénitude, les millions de livres de sagesse et de philosophie suffiraient amplement et depuis longtemps à ce Bonheur de "voi"". Ce n’est pas le cas. Ça ne marche pas! S’il suffisait de multiplier autour de Soi les richesses de ce monde, d’avoir la plus jolie maison du monde, la plus belle des femmes, et des billets de banque à ne plus savoir qu’en faire, outre ce que cette quête implique de sacrifice, de sueur, de larmes et de souffrance, qu’on s’impose et qu’on tente d’imposer le plus souvent aux autres, ces biens extérieurs ne comblent pas notre Cœur. Jamais ! Ils peuvent participer à la Beauté perçue, être un supplément de confort ajouté à notre capacité naturelle d’aimer la Vie, mais sans notre propension naturelle à l’Essentiel, l’accessoire ne nous apporte aucune solution durable.
Devenir, c’est suivre une ligne horizontale en surface d’un cercle et nous confondre à sa seule circonférence, en occultant complètement tout le cercle et sa partie pleine. N’avez vous pas compris ce qu’est le vide ? Ne vous êtes vous pas senti vide à trop courir après l’illusion d’un devenir heureux? A trop chercher un but, vous abandonnez le présent au profit d’un avenir illusoire. Le vide, c’est du Présent inhabité.
Devenir, c’est vivre sans Foyer, sans maison, sans ancrage, et donc sans Conscience. Vous vous êtes tellement oubliés, que vous vivez au travers les filtres et les masques de la surface, voilà le Moi, qui est la version la moins authentique de nous-même.
II- Revenez - Rêve né !
Renaissez à vous même en faisant mourir celui qui devient. Revenez au Cœur de ce Présent qui est le Berceau de la Vie-Une. Revenez à la Maison Intime, l’Essence qui n’est ni ancien ni nouveau, mais qui est l’intemporel en mouvement Consciente. La Beauté "Agie", mais sans âge.
Revenir, c’est restaurer l’égalité entre tous les Êtres qui ont la même Racine. Nous Sommes des gouttes de l’Éternité. Unis et non séparés, par les vibrations, même inconscientes, du Cœur. On l’oublie à trop s’engager sous le voile de Maya, mais "re-naître", c’est transcender la faiblesse d’un Mental Tyrannique, qui nous tient sous son joug. Ne vous méprenez pas. La peur, la violence, sont notre éloignement, notre renoncement à Soi-même, et surtout, la résistance fatale à ce que nous Sommes. À ne pas oser s’accueillir, on (se) fuit.
Revenir, c’est ressentir cette inspiration profonde qui remplit notre cercle. Et comme tous ces cercles intriqués sont beaux, quand chacun d’eux s’anime depuis notre Cœur.
Je ne veux plus errer entre les barrières du monde. Je veux m' imprégner de son épaisseur illimitée.
Moi, ma liberté, je la gagne à la sueur de mon Cœur. Je laisse les fronts à ceux qui pensent trop.
L'Amour, c'est aussi du Courage : s'offrir totalement dans l’altérite, sans plus jamais jamais renoncer à Soi. Mais ce courage n’est plus l’effort que le Mental impose. Il est la pure évidence. Celui qui a connu cette évidence dans son Cœur c’est ce qu’est le courage. Il ne faut pas changer. On est le changement du retour. Devenir, c’est ne pas revenir. Revenir, c’est ne plus devenir. C’est Être Soi, touché en plein Cœur par la grâce.
Voilà alors le plus beau des mouvements qui ne va nul part, mais qui va là où nous avons toujours été. Notre tête seule s’éloignait. Notre Cœur lui attendait. Nous nous attendions. Je m’attendais, et tandis que je m’éloignais, je m’entendais et refusais les messages de mon être profond. Je cherchais ailleurs ce que j’avais pourtant - et depuis toujours - en moi. Quelle absurde conquête!
L'Amour persévère discrètement, malgré la résistance qu'on lui oppose. Il est la Racine que la branche oublie, mais qui génère sa sève.
Revenir c’est trouver cet axe qui est la croisée de tous et de tout.
Tu seras lié à jamais
À la Présence subtile
De ceux qui auront été vrais.
À peine dix contre mille.
On se croit séparés, c'est essentiellement l'inverse : nous traversons une toile infinie de liens familiers à mettre au grand jour. À mesure que nous nous familiarisons avec cette évidence, notre Cœur sent l'intense et absolue solidarité entre Tout ce qui Est et ce qui Vit. La communion des Consciences, met en Lumière l'extraordinaire mouvement circulaire de nos connexions invisibles. Plus rien alors n'est autrement que Sublime, sur le bon axe du Cœur.
Nous sommes tous liés et égaux dans et par l’Universalité de l’Amour dont nous sommes des émanations Conscientes. Des poussières ? Peut-être, mais des versions pures et identiques à l’image du grand TOUT, comme un kaléidoscope reflète à l’infini la Lumière et la personnalise en chacun, comme surtout un univers Perception holographique que la physique quantique découvre progressivement, ce que des millénaires de sagesse antique savaient déjà : "tout contient chaque partie"! Nous Sommes des répliques de l’Univers, les parties identiques de cette Unité Sublime qui nous inspire. Dieu, l'Unité Primordiale, le TOUT, l'Univers, qu'importe! Tout est là, Tous sont en nous. Ce lien - que l’esprit ne peut « imaginer » tant cet Infini est indéfinissable, EST (ESSE) et n’a besoin de devenir. De même qu’il n’y a ni commencement ni fin, nous Sommes UN, l’un et l’autre. Non séparés. Je n’ai pas d’idée qui domine la tienne. Je n’ai pas de pouvoir sur toi. En revanche j’ai le pouvoir de n’être qu’en incarnation en devenir, séparé de tout cela, jusqu'à je me re-trouve. J’ai le pouvoir ou la force de courir après moi-même et de ne jamais me rattraper. Simplement parce que je ne pense pas à revenir, là où je repose.
Revenez. On peut paraître ou avoir, mais Impossible d'être autre chose que l' on Est. Tout est déjà là. Et rien ne peut en partir. J'aime ces êtres qui ne font que passer en cette Vie, ceux dont la présence s'installe et s'impose à jamais en Soi, car l'on côtoie tant de gens qui n'installent et n'imposent pour autant jamais, que leur absence en échange d'un besoin d'émotions éphémères.
S'autoriser le meilleur, sans s'aliéner au pire... Et si nous commencions à vivre vraiment? Dès ici et maintenant en Conscience de notre infinie Beauté. Voilà le rêve éveillé en chacun. Voilà notre simple et constate Demeure!
Chris le Gardien. 4 ème méditation de janvier 2019.